un peu d'histoire,les poids monétaires
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Raptor76
Chercheur76
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un peu d'histoire,les poids monétaires
Depuis quelques années, les amateurs de numismatique ont pu remarquer un nouvel engouement pour ces petits objets, qu’ils soient ronds, carrés, hexagonaux, faits de cuivre, de verre, de laiton ou encore de bronze… Qu’on les nomme dénéraux, pondéraux, le nom le plus souvent utilisé reste poids monétaires. Ce soudain intérêt semble nous montrer combien ces objets ne sont pas anodins. Ils sont chargés d’histoire ; ils véhiculent avec eux un passé fait de trocs, d’échanges, et autres relations humaines.
L’Antiquité
De tout temps l’homme a pratiqué l’échange « Acte par lequel on abandonne une chose à quelqu'un pour en recevoir une autre en contrepartie ». Ce désir ou besoin humain, est encore bien présent de nos jours.
Même si les premiers étalons ont été fabriqués en Asie et en Égypte bien avant l’invention de la monnaie, depuis l’Antiquité on vérifiait déjà la justesse de la pesée des négociants et des commerçants à l’aide d’étalons de mesure. C’est ainsi que pendant la période romaine on trouve des poids appelés exagium (pour les monnaies de type statère) ; on trouve également des exagia solidi (pour les monnaies solidus).
Le Haut Moyen Âge
Malgré cela et surtout suite à la chute de l’empire romain et au désordre monétaire causé par les multiples invasions et autres guerres intrinsèques, il semble que l’on prenne conscience à cette époque de l’importance d’une monnaie « unifiante », qui permettrait à la fois le développement des échanges commerciaux et une meilleure stabilité monétaire.
L’Âge Féodal
Il faut pourtant attendre la fin du XIe siècle, pour que la valeur d'échange d'une pièce dépende essentiellement de sa masse et de son titre (or/argent). C’est à cette époque là que l’unité de poids (la livre) est remplacée par le marc, lui même divisé en onces, gros, deniers, esterlins, mailles, felins et grains. Par exemple en France le marc se divise en 8 onces, l’once en 8 gros, le gros en 3 deniers, le denier en 24 grains. Le marc restera l’unité de masse jusqu’en 1795.
Il me semble important de faire la différence entre masse et poids : en effet l'utilisation courante du terme poids dans la langue française est en fait erronée. L'entité physique que l'on mesure en kilogramme lorsqu'on se pèse est la masse (qui est la même quel que soit l'endroit où se trouve l'objet dans l'univers) et non le poids d'un objet (qui varie selon l’endroit de l'univers).
Le bas Moyen Âge
Dans son livre « manuel des poids monétaire » Dieudonné place vers 1330 le début des dénéraux, sous le règne de Philippe VI de Valois.
Il faut savoir qu’à cette époque les monnaies étaient fabriquées et frappées dans une bande de métal dont une ordonnance royale précisait le nombre exact de monnaies à produire dans cette dite bande (la taille), les ajusteurs de l’époque devaient alors vérifier la masse de chaque monnaie qui ne pouvait pas être différente que celle préconisée, en admettant toutefois une tolérance de masse admise.
Ainsi tous ceux qui utilisaient la monnaie de façon journalière, avaient bien conscience que la valeur d'échange d'une pièce dépendait essentiellement de sa masse mais aussi de son titre (or ou argent). Aussi fallait-il faire face à l’usure normale des monnaies que l’on appelle le frai (d’ailleurs les monnaies étaient souvent frappées avec une masse légèrement supérieure), mais aussi à certains actes répréhensibles que pratiquaient coquins, faussaires, et autres maroufles qui n’hésitaient pas à enfreindre la loi au péril de leur vie. Ces derniers pratiquaient le rognage (limage du pourtour d'une monnaie afin d’en récupérer un peu de métal), ou fourraient des monnaies (monnaie constituée d'une âme de métal vil recouverte d'une pellicule d'argent ou d’or). Il faut savoir qu’au Moyen Âge, le faux-monnayage est considéré comme un crime de lèse-majesté (les coupables sont condamnés à être exécutés par ébouillantage).
Les poids monétaires apparaissent alors pour réglementer et faciliter les échanges commerciaux entre changeurs, banquiers, commerçants.
Chaque poids pèse la masse exacte d’une monnaie précise, et on peut les reconnaitre grâce aux inscriptions ou dessins sur leurs faces.
En effet certains imitent la dite monnaie comme l’écu d’or à la chaise, de Philippe VI (1293-1350) à Jean le bon (1319-1364), valeur 3D 13G = 4.53gr, représentant un roi en costume de guerre assis dans une chaise, tenant une épée et un écu.
Ecu---la-chaise-4.7-gr.jpg
D’autres expriment la masse de la monnaie en grains et deniers, ici pour contrôler le teston d’argent de Louis XII (1462-1515) à Henri III (1551-1589), valeur de 7D 12G à 7D 4G (de 9.60gr à 9.13gr).
teston-copie-1.JPG
D’autres plus simplement portent le nom de celle-ci : TESTON. Ici un écu à trois lys couronnés accosté de 2 "H" eux aussi couronnés (donc pour Henri II et III) sur l'avers, et "TESTON VIID XGR" sur le revers.
Les pièces de monnaie en circulation au Moyen Âge provenaient bien sûr du Roi de France mais aussi des pays voisins comme l’Italie, l’Angleterre, la Hollande, et l’Espagne. On peut facilement alors imaginer le nombre de monnaies qui pouvaient circuler sur le territoire Français à cette époque. De plus l’évolution du prix de l’or et de l’argent fluctuant, la masse des pièces changeait elle aussi. D’ailleurs certaines monnaies qui perdurèrent de longues années changèrent souvent de poids de tolérance. Par exemple le poids pour le demi-teston qui était utilisé sous les règnes de Louis XII à Henri III, changea de masse suivant les périodes, il passa de 3D18G (3 deniers et 18 grains) à 3D17G, pour finir à 3D14G.
La Renaissance
Il faudra attendre le XVIe siècle pour voir fleurir chez les commerçants, changeurs, banquiers et autres manipulateurs de monnaies, de petites balances utilisées pour peser les monnaies. Ces petites boîtes faites de bois contenaient le trébuchet, balance à bras équilibrés, ainsi que des poids pour contrôler les différentes monnaies de l’époque.
balance-copie-1.jpg
Avant l’apparition de ces balances, pour s'assurer que la pièce était de bon aloi (dérivé du verbe "aloier" puis de "aleier", gouverner selon la loi et la justice), les changeurs laissaient tomber la pièce sur une surface dure pour la faire sonner, la clarté du son donnait alors une indication sur la qualité du métal. L'usage combiné de ces deux méthodes (trébuchet et tintement de la pièce) donnera jour à une autre expression concernant la monnaie « les espèces sonnantes et trébuchantes ». Demander à être payé en monnaie sonnante et trébuchante signifiait que l'on voulait être payé en monnaie authentique et de masse exacte.
le-changeur-metsys.jpgPetrusChristusSaintEloi.jpg
Quentin Metsys (1465-1530) Petrus Christus (1444-1475/76),
Le peseur d’or et sa femme, Saint Eloi orfèvre dans sa boutique
La Révolution Française
Il faudra attendre la révolution Française avec son contexte de crise économique et politique (Il faut rembourser les dettes de la monarchie : environ cinq milliards de livres.) et la mise en place d’un nouveau système métrique décimal, permettant de convertir plus aisément les unités (pour passer d'une unité à ses multiples et sous-multiples, il suffit de déplacer la virgule) pour que le franc devienne l'unité monétaire officielle de la République.
La mise en place du système métrique pour la mesure des masses rend alors inutile le recours au poids pour vérifier l’authenticité d’une monnaie.
Le décret du 15 août 1795 va définir le franc :
- les pièces en argent : la pièce de 1 franc pèsera 5 grammes, celle de 2 francs 10 grammes, celle de 5 francs 25 grammes
- les pièces en cuivre : le décime pèsera 20 grammes et le centime 10 grammes.
Les pièces de monnaies pourront même être utilisées comme unité de référence de poids.
Le premier Empire :
La coexistence entre les anciennes pièces et les nouvelles posant encore des problèmes, Napoléon Bonaparte va décider de la frappe d’une nouvelle monnaie par la loi du 7 germinal An XI (28 mars 1803).
La décision fut de frapper des pièces d'argent de cinq, deux, un franc, cinquante, et vingt-cinq centimes, de pièces d'or de vingt et quarante francs, titrant 9/10e d'or, le tout basé sur un gramme d'or valant lui-même quinze grammes et demi d'argent. La valeur réelle des pièces va alors coïncider avec sa valeur de compte.
La monnaie Française se nomme alors le franc dit « germinal », qui demeurera inchangé jusqu'au lendemain de la Première Guerre mondiale.
Ainsi les poids monétaires n’ont plus lieu d’être dans ce monde de monnaies aseptisées, et vont de ce fait disparaitre petit à petit.
« Il en est des passions nobles comme des vices :
Plus elles se satisfont, plus elles s'accroissent. »
Honoré de Balzac
L’Antiquité
De tout temps l’homme a pratiqué l’échange « Acte par lequel on abandonne une chose à quelqu'un pour en recevoir une autre en contrepartie ». Ce désir ou besoin humain, est encore bien présent de nos jours.
Même si les premiers étalons ont été fabriqués en Asie et en Égypte bien avant l’invention de la monnaie, depuis l’Antiquité on vérifiait déjà la justesse de la pesée des négociants et des commerçants à l’aide d’étalons de mesure. C’est ainsi que pendant la période romaine on trouve des poids appelés exagium (pour les monnaies de type statère) ; on trouve également des exagia solidi (pour les monnaies solidus).
Le Haut Moyen Âge
Malgré cela et surtout suite à la chute de l’empire romain et au désordre monétaire causé par les multiples invasions et autres guerres intrinsèques, il semble que l’on prenne conscience à cette époque de l’importance d’une monnaie « unifiante », qui permettrait à la fois le développement des échanges commerciaux et une meilleure stabilité monétaire.
L’Âge Féodal
Il faut pourtant attendre la fin du XIe siècle, pour que la valeur d'échange d'une pièce dépende essentiellement de sa masse et de son titre (or/argent). C’est à cette époque là que l’unité de poids (la livre) est remplacée par le marc, lui même divisé en onces, gros, deniers, esterlins, mailles, felins et grains. Par exemple en France le marc se divise en 8 onces, l’once en 8 gros, le gros en 3 deniers, le denier en 24 grains. Le marc restera l’unité de masse jusqu’en 1795.
Il me semble important de faire la différence entre masse et poids : en effet l'utilisation courante du terme poids dans la langue française est en fait erronée. L'entité physique que l'on mesure en kilogramme lorsqu'on se pèse est la masse (qui est la même quel que soit l'endroit où se trouve l'objet dans l'univers) et non le poids d'un objet (qui varie selon l’endroit de l'univers).
Le bas Moyen Âge
Dans son livre « manuel des poids monétaire » Dieudonné place vers 1330 le début des dénéraux, sous le règne de Philippe VI de Valois.
Il faut savoir qu’à cette époque les monnaies étaient fabriquées et frappées dans une bande de métal dont une ordonnance royale précisait le nombre exact de monnaies à produire dans cette dite bande (la taille), les ajusteurs de l’époque devaient alors vérifier la masse de chaque monnaie qui ne pouvait pas être différente que celle préconisée, en admettant toutefois une tolérance de masse admise.
Ainsi tous ceux qui utilisaient la monnaie de façon journalière, avaient bien conscience que la valeur d'échange d'une pièce dépendait essentiellement de sa masse mais aussi de son titre (or ou argent). Aussi fallait-il faire face à l’usure normale des monnaies que l’on appelle le frai (d’ailleurs les monnaies étaient souvent frappées avec une masse légèrement supérieure), mais aussi à certains actes répréhensibles que pratiquaient coquins, faussaires, et autres maroufles qui n’hésitaient pas à enfreindre la loi au péril de leur vie. Ces derniers pratiquaient le rognage (limage du pourtour d'une monnaie afin d’en récupérer un peu de métal), ou fourraient des monnaies (monnaie constituée d'une âme de métal vil recouverte d'une pellicule d'argent ou d’or). Il faut savoir qu’au Moyen Âge, le faux-monnayage est considéré comme un crime de lèse-majesté (les coupables sont condamnés à être exécutés par ébouillantage).
Les poids monétaires apparaissent alors pour réglementer et faciliter les échanges commerciaux entre changeurs, banquiers, commerçants.
Chaque poids pèse la masse exacte d’une monnaie précise, et on peut les reconnaitre grâce aux inscriptions ou dessins sur leurs faces.
En effet certains imitent la dite monnaie comme l’écu d’or à la chaise, de Philippe VI (1293-1350) à Jean le bon (1319-1364), valeur 3D 13G = 4.53gr, représentant un roi en costume de guerre assis dans une chaise, tenant une épée et un écu.
Ecu---la-chaise-4.7-gr.jpg
D’autres expriment la masse de la monnaie en grains et deniers, ici pour contrôler le teston d’argent de Louis XII (1462-1515) à Henri III (1551-1589), valeur de 7D 12G à 7D 4G (de 9.60gr à 9.13gr).
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D’autres plus simplement portent le nom de celle-ci : TESTON. Ici un écu à trois lys couronnés accosté de 2 "H" eux aussi couronnés (donc pour Henri II et III) sur l'avers, et "TESTON VIID XGR" sur le revers.
Les pièces de monnaie en circulation au Moyen Âge provenaient bien sûr du Roi de France mais aussi des pays voisins comme l’Italie, l’Angleterre, la Hollande, et l’Espagne. On peut facilement alors imaginer le nombre de monnaies qui pouvaient circuler sur le territoire Français à cette époque. De plus l’évolution du prix de l’or et de l’argent fluctuant, la masse des pièces changeait elle aussi. D’ailleurs certaines monnaies qui perdurèrent de longues années changèrent souvent de poids de tolérance. Par exemple le poids pour le demi-teston qui était utilisé sous les règnes de Louis XII à Henri III, changea de masse suivant les périodes, il passa de 3D18G (3 deniers et 18 grains) à 3D17G, pour finir à 3D14G.
La Renaissance
Il faudra attendre le XVIe siècle pour voir fleurir chez les commerçants, changeurs, banquiers et autres manipulateurs de monnaies, de petites balances utilisées pour peser les monnaies. Ces petites boîtes faites de bois contenaient le trébuchet, balance à bras équilibrés, ainsi que des poids pour contrôler les différentes monnaies de l’époque.
balance-copie-1.jpg
Avant l’apparition de ces balances, pour s'assurer que la pièce était de bon aloi (dérivé du verbe "aloier" puis de "aleier", gouverner selon la loi et la justice), les changeurs laissaient tomber la pièce sur une surface dure pour la faire sonner, la clarté du son donnait alors une indication sur la qualité du métal. L'usage combiné de ces deux méthodes (trébuchet et tintement de la pièce) donnera jour à une autre expression concernant la monnaie « les espèces sonnantes et trébuchantes ». Demander à être payé en monnaie sonnante et trébuchante signifiait que l'on voulait être payé en monnaie authentique et de masse exacte.
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Quentin Metsys (1465-1530) Petrus Christus (1444-1475/76),
Le peseur d’or et sa femme, Saint Eloi orfèvre dans sa boutique
La Révolution Française
Il faudra attendre la révolution Française avec son contexte de crise économique et politique (Il faut rembourser les dettes de la monarchie : environ cinq milliards de livres.) et la mise en place d’un nouveau système métrique décimal, permettant de convertir plus aisément les unités (pour passer d'une unité à ses multiples et sous-multiples, il suffit de déplacer la virgule) pour que le franc devienne l'unité monétaire officielle de la République.
La mise en place du système métrique pour la mesure des masses rend alors inutile le recours au poids pour vérifier l’authenticité d’une monnaie.
Le décret du 15 août 1795 va définir le franc :
- les pièces en argent : la pièce de 1 franc pèsera 5 grammes, celle de 2 francs 10 grammes, celle de 5 francs 25 grammes
- les pièces en cuivre : le décime pèsera 20 grammes et le centime 10 grammes.
Les pièces de monnaies pourront même être utilisées comme unité de référence de poids.
Le premier Empire :
La coexistence entre les anciennes pièces et les nouvelles posant encore des problèmes, Napoléon Bonaparte va décider de la frappe d’une nouvelle monnaie par la loi du 7 germinal An XI (28 mars 1803).
La décision fut de frapper des pièces d'argent de cinq, deux, un franc, cinquante, et vingt-cinq centimes, de pièces d'or de vingt et quarante francs, titrant 9/10e d'or, le tout basé sur un gramme d'or valant lui-même quinze grammes et demi d'argent. La valeur réelle des pièces va alors coïncider avec sa valeur de compte.
La monnaie Française se nomme alors le franc dit « germinal », qui demeurera inchangé jusqu'au lendemain de la Première Guerre mondiale.
Ainsi les poids monétaires n’ont plus lieu d’être dans ce monde de monnaies aseptisées, et vont de ce fait disparaitre petit à petit.
« Il en est des passions nobles comme des vices :
Plus elles se satisfont, plus elles s'accroissent. »
Honoré de Balzac
Re: un peu d'histoire,les poids monétaires
Bravo cool pour l'info
paupiette76- Messages : 1190
Date d'inscription : 07/03/2015
Re: un peu d'histoire,les poids monétaires
Très beau sujet denis
drakar76- Messages : 1528
Date d'inscription : 12/08/2014
Age : 62
Localisation : SAINTE ADRESSE
Re: un peu d'histoire,les poids monétaires
merci pour l'article
bruno76610- Messages : 1714
Date d'inscription : 16/08/2014
Age : 60
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